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Les paysages désenchantés d'In Situ

Plus qu'un état du paysage en Alsace, la nouvelle exposition du FRAC à Sélestat est d'abord un regard sur la photographie contemporaine. Passablement désenchantée. On sait Pascal Neveux attentif à la question du paysage et à la façon dont les plasticiens se confrontent à nos territoires. Pour cette exposition qui privilégie l'art photographique, le directeur du FRAC a sollicité des artistes ayant travaillé sur le paysage alsacien. Ni romantiques forêts vosgiennes cependant, ni Ried mélancolique, ni matins brumeux flottant sur la plaine d'Alsace... « Mulhouse, c'est ça ! » A cette Alsace de brochure touristique, In Situ oppose un territoire désenchanté : celui des lisières entre ville et campagne, d'un quotidien qui, de fait, ne distingue en rien l'Alsace d'une autre région. Ainsi, les zones pavillonnaires de Sélestat photographiées froidement par Jurgen Nefzger, les visions fugitives que Philippe Lepeut saisit dans un train, l'univers industriel du Port de Strasbourg qu'a fixé Alice Bommer, ou encore les carcasses de voiture compressées que François Nussbaumer traite, dans de grands formats, tels de véritables tableaux, offrant au chaos de la matière une ambiguë beauté plastique. Et la mythologie du Rhin, célébrée par les poètes et les peintres, en prend elle aussi un coup, avec la déambulation de Thierry Girard le long du fleuve : il donne du Vater Rhein une vision industrialisée, totalement encadrée par les ouvrages d'art, réduit à la fois à un boulevard touristique et à un espace économique désincarné. Actuellement à l'affiche de la Filature, Paulo Nozolino a bénéficié d'une résidence d'artiste en Alsace et livre ici un fragment de son travail : quatre pièces, en noir et blanc, qui parlent de Colmar et de Mulhouse en traitant leur modernité d'une façon métaphorique : des détails d'une laverie ou d'un hôtel, un couple mixte enlacé - image de la beauté mais aussi de la tristesse (« Pour moi, Mulhouse, c'est ça ! », lâche simplement Nozolino). Même tonalité dans le travail vidéo de Thierry Auè, qui met en scène un dispositif de huit moniteurs installés contre la façade vitrée du FRAC. Le passant découvre ainsi de petites séquences à travers lesquelles l'artiste s'attache à donner de la consistance à des objets ou phénomènes quasi imperceptibles - le vent sur une bâche de chantier, l'ombre d'un poteau, un sac plastique. De la poésie pure, à partir de pas grand-chose, et c'est ce pas grand-chose qui fascine Thierry Auè. Vidéo encore, mais pratiquée de très singulière façon par Luc Meichler et Gisèle Rapp-Meichler. A partir du volumineux travail photographique du premier, la seconde réalise un film où les photos sont passées en revue, intégrées dans un langage cinématographique (bande son, incrustation de textes, montage ou alternent scènes extérieures et gros plans sur les photos). Une étrange distance est ici posée à l'égard de la photo. « Je ne me vois pas accrocher mes tirages au mur, comme si c'étaient des tableaux. J'aurais le sentiment d'une usurpation. La photo n'est pas un original. C'est reproductible à l'infini... », indique Luc Meichler. Ce n'est en tout état de cause pas le discours dominant dans le monde de la photographie contemporaine.

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Serge Hartmann

Jusqu'au 23 décembre au FRAC-Alsace - 1 espace Estève à Sélestat. Du mercredi au samedi de 14h à 18h, dimanche de 11h à 18h. * 03 88 58 87 55.

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Images animées ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

« In Situ », la nouvelle exposition collective du Frac Alsace se tient jusqu'au 23 décembre à Sélestat.Huit univers photographiques très différents y sont présentés sur le thème du paysage alsacien et rhénan.

Ils sont huit photographes à dévoiler leur vision du territoire alsacien. Au fil du Rhin ou au milieu des lotissements sélestadiens, chacun propose une lecture imagée d'un paysage commun. Ils donnent à voir, mais ils se positionnent aussi sur l'image et l'art visuel qu'est la photographie. Une discipline dont l'identité a explosé ces dernières années. « Il n'y a plus une définition de la photo, mais une multitude, explique Pascal Neveux, le directeur du Frac Alsace. Il en résulte une énorme diversité, notamment avec l'introduction de la vidéo ». Luc Meichler pratique justement la photographie en alternance avec le film et la vidéo. Pour « In Situ », cet artiste alsacien qui vit à Paris expose Cinéfoto, un travail réalisé avec sa femme Gisèle. Ensemble, ils ont réalisé une trentaine de films depuis 1976. Avec la vidéo, Luc Meichler « trouve un plaisir à manipuler les photos, à les confronter entre elles, à les montrer directement aux gens ». Et de poursuivre : « La vidéo permet de ne pas figer les photos dans une sorte de sacralité, de les conserver pour un usage plus familier et quotidien. » Les autres artistes présents : Thierry Aué, Alice Bommer, Thierry Girard, Philippe Lepeut, Jürgen Nefzger, Paulo Nozolino et François Nussbaumer.

«In Situ », au Frac Alsace. Ouvert du mercredi au samedi, de 14 h à 18 h ; le dimanche de 11 h à 18 h. Fermée les jours fériés. Entrée libre. Tél. 03 88 58 87 55.